Orkem a vu le jour un matin de canicule sur les terres de Sezni, où il a vécu de longues années avant que son poste de conseiller ne lui offre l'occasion de quelques déplacements en tant qu'émissaire de Sven Ramose. Il n'a jamais eu le projet de quitter plus durablement que le temps d'une mission de représentation auprès  Ergorn les terres du peuple du feu, amoureux de leur aridité, leur dangerosité, et la rudesse qu'elles prodiguent obligeant les hommes à acquérir rigueur, solidité physique et mentale, combattivité et endurance, des qualités auxquelles il est fortement attaché et qu'il ne se permet et ne se permettra pas d'en mettre ni l'intégrité en péril, ni de la quitter réellement...a moins, éventuellement qu'il n'aie pas le choix que de déménager pour amadouer sa douce.

Orkem a toujours vécu à Sezni. Sa famille est loin de faire partie des milieux aisés, peu nombreuse par rapport aux moyennes de Sezni et surtout, peu soudée. Ce "clan familial" relève plus du moyen de survivre que du noyau chaleureux et aimant auquel tout enfant pourrait aspirer, mais pas lui. Si la famille en tant qu'unité générationnelle disposait d'une certaine valeur aux yeux du patriarche et des membres de de celle-ci, il n'était absolument pas inconcevable que l'un d'entre eux n'y accorde aucun crédit, et il en est la preuve vivante. Eduqué dans la droiture et des règles strictes (lui coûtant souvent la violence de son père), le jeune homme était cependant le plus docile de la fratrie. Ses aînés ne se privaient d'ailleurs pas de le plonger dans les ennuis pour provoquer la colère de leur père, qui lui dispensa une éducation certes restreinte, mais lui donnant de bonnes bases de réflexion, l'amenant à vouloir en savoir plus sur tout et n'importe quoi, et l'endurcissant de manière magistrale à coups de raclées successives. Sa curiosité intellectuelle et sa tendance à prendre les choses à cœur ne sont pas des sinécures: quand il entreprend quelque chose, il est prêt absolument à tout pour que cela aboutisse. Une fois gradé, il fut rapidement remarqué par ses supérieurs : sa vision du monde et ses compétences militaires plaisaient à la capitale du Sezni et à ses supérieurs, mais avant cela, il lui fallut faire ses preuves en tant que simple soldat..

Après la cérémonie, choisi et béni par les flammes - comme le reste de sa famille -, il se forma aux arts de combat en se penchant fortement sur la stratégie et le combat rapproché, profitant au passage de l'occasion pour couper tous lien avec son autorité parentale. Il regarde désormais ses frères depuis son siège de conseiller, et si il leur parle encore, il n'a que faire de leur survie ou de leur devenir : leurs relations sont réciproquement purement intéressées, si interactions il doit y avoir, elles ne seront que dans cette optique.

Sa vision du monde, des relations humaines, son obstination à accomplir les tâches qu'il entreprend, ses compétences militaires et son manque complet d'empathie plaisaient aux têtes en place à la capitale du Sezni, et plaisent toujours autant au nouveau système, si ce n'est même plus . Lorsqu'il obtint son tatouage, il commença à mener sa vie "tranquillement", aussi tranquillement tout du moins que ce qu'un soldat perfectionniste, calculateur et intelligent comme il l'était le permettait, jusqu'à ce que Sven Ramose prit le pouvoir. Orkem s'intéressait à ses idées et ses valeurs. Cet homme lui plaisait, dans sa manière d'être, ses idéaux, sa combattivité, et Vahlaan, soutenant son coup d'état depuis son poste de militaire gradé décida de lui prêter main-forte avec acharnement...sans le consulter le moins du monde.

Avant cela, il avait fait le choix d'une carrière militaire, profitant de son temps libre pour s'offrir le luxe d'un peu de lecture...ou de participation à des combats clandestins : son premier réseau de contacts, parmi la pègre. A l'époque, sous l'ancien régime en place, une de ses occupations favorites au sein de son travail était de proposer de nouvelles stratégies de combat, de nouvelles techniques d'entrainement, et même une véritable restructuration du système militaire en place. Jeune, bon guerrier et stratège mais lésé par le manque d'expérience, Orkem ne vit pas son travail pris au sérieux pendant des années, mais depuis l'ombre, Ramose avait vu en lui un potentiel gigantesque pour sa future armée et sa future gestion politique. Ainsi fut-il repéré avant même que le coup d'état de Sven ne chamboula sa vie, et lorsqu'enfin le pouvoir changea de main, son travail finit par payer rapidement : Obtenant la confiance du dictateur par quelques coups d'éclats durant les phases préliminaires au putsch (entre partage de convictions avec quelques têtes pensantes et chefs de guerre, meurtres en tous genres et immobilisation de certains possibles opposants), celui-ci lui proposa de faire partie de ses conseillers, officieusement, puis par la suite officiellement, ce qu'il accepta sans se faire prier.

Entrer dans les petits papiers de Ramose n'avait pas été chose aisée: durant des mois, il avait essayé de se rapprocher de ce marchand talentueux et ambitieux. Au début de sa carrière militaire, Orkem était un soldat impétueux, acharné à la tâche, respectueux de ses supérieurs...dans la mesure du possible. Plusieurs fois, le conseil disciplinaire lui fit frôler la correctionnelle pour avoir parlé un peu trop fort et pris des responsabilités qu'un soldat de son rang ne devrait même pas considérer. Cela dit, ses idées ne tombaient pas dans l'oreille de sourds, et il arriva à deux reprises qu'après un passage en conseil de discipline, les idées qu'il avait oser avancer à ses supérieurs passèrent au stade de réalité. Fort de ce constat, il se fit plus calme, toujours aussi dévoué à sa tâche, mais se contentant d'obéir et de se taire. Il était devenu le soldat le moins loquace qu'avait connu sa promotion (et les dieux seuls savent à quel point, de base, les militaires du Feu n'ont pas la langue bien pendue!) et probablement celles passées et à venir, si l'on exclut les muets du lot. Profitant des permissions, rares, mais ô combien appréciées, pour disparaître dans la nature et réapparaître dans des arènes clandestines sous le nom de Damean, surnommé au fil des combats "le pacificateur", il gagna ainsi des sommes d'argent considérables, distrayant tant le bas peuple en mal de sensation que le bourgeois ou le noble avide de sang et de violence, en parallèle de quoi, un à un, il gravissait les échelons de la hiérarchie militaire, travaillant toujours avec plus d'acharnement. Son chef de faction, ainsi que deux commandants, le suivaient de près, et il s'efforçait de ne pas les décevoir, ce à quoi il réussit avec brio.

L'homme de terrain était devenu lieutenant de terrain. Le lieutenant était devenu stratège, pas plus haut-gradé, mais paisiblement installé dès lors à l'intérieur de bureaux plus ou moins confortables, mais surtout, cela lui offrait à la fois la possibilité de se cultiver plutôt que de frapper à tour de bras, mais également de se rapprocher de l'Etat-Major. Et si Ramose n'avait pas pris le pouvoir, il aurait pu continuer à escalader la pyramide hiérarchique à la force de ses bras et de son mental d'acier, mais le destin n'en a pas voulu ainsi, et la prise de pouvoir du nouveau dictateur n'eut pas vraiment d'effet direct sur sa vie à ce moment. De Sven Ramose, parlons-en. Lorsqu'il fomenta son coup d'état, Orkem était aux premières loges, et pour cause! Si Sven ralliait à sa cause des groupuscules entiers, et même parmi les militaires, Orkem lui facilita la tâche auprès de ses hommes, sans jamais agir en pleine lumière à ce stade. Plus encore, quoi que ce fut tardivement, il s'invita même à la fête en personne, indépendamment de son statut militaire et de sa famille. Il n'était pas le colonel Vahlaan, ni Orkem Vahlaan ce jour la. Il était Orkem. Simplement Orkem. Il accompagna Sven tout au long des agissements de sa rébellion, perpétrant meurtres et organisant batailles à foison pour faciliter la tâche du futur dictateur, et lorsqu'enfin Sven s'assit sur le siège consacré à son rang, Orkem était comme une ombre derrière les tentures rouge sang, loin de l'officialité que demandait théoriquement son rôle, il s'était contenté d'agir de loin, insistant encore et toujours sur son anonymat, quelle que soit son action.

Cependant, il était inutile d'être devin pour reconnaître sa patte dans bien des complots parallèles aux actes du putschiste, et la hiérarchie militaire l'introduisit auprès de Sven. Il lui déballa tout ce qu'il avait pu faire durant ces mois de préparation, avisé par un ami, qui lui-même avait un ami qui connaissait quelqu'un qui avait eu vent des ambitions de Ramose. Sans s'interrompre, sans la moindre once de regret, de fierté, ou de modestie. Cela plut à Sven Ramose, qui lui proposa de le conseiller dans l'ombre, dans un premier temps, puis finit par lui offrir un poste fixe et officiel de conseiller, tant militaire que diplomatique. Un lien de respect mutuel unissait depuis lors les deux hommes, tant pour les qualités de l'autre que pour ses agissements, et l'ex-militaire, devenu conseiller ainsi qu'émissaire auprès des représentant du Feu à Lucrezia, obtint une place de choix dans l'entourage de Sven, une place qu'il défendit bec et ongles les premières années, et que plus aucun rapace ne pouvait prétendre convoiter. Quoi qu'il maîtrisât moins bien l'élément Feu que Ramose, Orkem avait acquis une nouvelle fois une solide réputation d'adversaire redoutable, et les deux hommes, malgré leur différence d'un cran sur l'échelle hiérarchique, se savaient faits de la même trempe.

Son nouveau travail impliquait d'être au courant des situations diplomatiques et de se renseigner sur tout ce qui pourrait présenter un intérêt pour la société Feu, chose qui plut tout de suite à Orkem, voyant en l'information une forme de pouvoir que lui déléguait le dirigeant. Disposant donc de ces nouveaux atouts à la fois professionnels et personnels, il se donne depuis lors à fond dans la tâche qui lui incombe même si cela le force souvent à voyager de longues lunes entre Dahud et Sezni, au point d'avoir dans chacun des deux une résidence. Les Ergorn, à Lucrezia, représentants de la nation Feu, entretiennent avec lui d'excellentes relations, plus étroites encore avec le patriarche et chef actuel de la famille Karam Ergorn qu'avec les autres. Lucrezia serait donc, si Orkem venait à déménager, une location privilégiée à ses yeux.


Les dieux en soient témoins à Orkem, il hait au plus profond de lui-même tous ceux qui n'ont pas de don élémentaire. Il peut entretenir d'excellentes relations avec des gens de tous bords, si tant est que ceux-ci aient la capacité de maitriser un élément, sans quoi, ils ne sont pour lui que des ennuis. Cette "haine du faible" lui vient de son éducation familiale, mais surtout de la jalousie des "insectes", comme il se plait à les appeler dans le cadre privé, vis à vis des pouvoirs de ceux qui ont la capacité de manipuler l'eau, le feu, l'air ou la terre. De la même manière, tout Innocent se présentant à lui n'est qu'un cloporte dont le potentiel reste à voir, mais passée la cérémonie, quiconque n'est pas tatoué ne peut à ses yeux prétendre à être son égal.



Lors qu'un voyage d'affaires à Lucrezia, Orkem rencontra Eden, une jeune femme dont il tomba éperdument amoureux au premier regard. Rayon de soleil dans son obscure existence, brise glacée soufflant sur un désert a l'atmosphère caniculaire, elle était devenue  sa nouvelle étoile du berger à l'instant précis de leur rencontre. Cela pouvait paraître démesuré, fou, insensé, mais il fallait, tout son être le lui hurlait, qu'il la garde auprès de lui, de quelque manière que ce soit. C'est donc tout naturellement qu'il a enfermé cette fille dans une cabane longeant l'orée de la jungle et la visitait dès que possible entre ses rendez-vous et autres affaires. Il s'occupait bien d'elle, veillait à ce qu'il ne lui manque ni distractions, ni subsistance... S'étant assuré de brûler la marque de Terre au nom de laquelle elle refusait de se soumettre à sa volonté, Orkem en avait donc fait sa propriété. L'idée était qu'en rentrant à Inaki avec elle, il la ferait officiellement et définitivement sienne...Mais ce fut une des rares fois ou un plan d'Orkem fut un échec. Durant le voyage de retour à Sezni, l'ingénue se déroba dans un moment d'insouciance de la part du conseiller qui, après une longue journée de travail, s'était offert le luxe d'une petite sieste... Faisant passer ses responsabilités avant le plaisir, il hésita cependant mais poursuivit ses affaires, sans pour autant se résoudre à la laisser filer pour toujours. Peu importe le temps que cela prendra, peu importe les moyens et les sacrifices tant que ma loyauté reste à sa nation : Orkem la retrouverait. Et cette fois, elle n'aura plus la moindre chance de se dérober. Elle lui appartiendrait totalement. Seules de très rares personnes de confiance savent qu'il la recherche, mais aucun ne sait ni pourquoi, ni ce qu'il s'est passé, et cette histoire reste un mystère même pour ceux qui peuvent se dire "proches" de lui.


Conseiller de Sven, Orkem est un politicien habile, en partie responsable de la gestion des armées et de la stratégie militaire. Il a gagné ses galons à force de travail, d'attitudes parfois plus suicidaires que raisonnables, mais il sait maintenir sa place et asseoir son autorité. Il sait certes être poli et flatteur, mais (et Sven le sait très bien) c'est l'incarnation même de l'expression "un poing de fer dans un gant de velours".



Il suffit de trois mots pour dire ce qu'il en est : Rien à foutre. Tant que ça n'interfère pas avec ses plans et missions, ou qu'il ne peut pas tirer d'avantages significatifs à sauver le condamné, il ne s'arrêtera même pas, sauf si exceptionnellement l'exécution est particulièrement bien organisée, juste pour le plaisir des yeux. Mais ce genre de distractions futiles n'est valable que sur son temps libre, il est donc nécessaire de préciser de nouveau que c'est le genre de choses dont il n'a absolument rien à faire.



Bien au contraire, Orkem considère cette séparation comme normale, mais ne juge pas particulièrement par l'élément mais par la présence ou l'absence de maîtrise de celui-ci. Si tous les éléments vivaient harmonie, les dieux n'auraient plus qu'à être une seule et même entité, or cette idée d'un possible monothéisme illustré par un tel rapprochement le rend malade : si les éléments sont si différents, ce n'est pas pour être réunis en une seule et même population, une seule et même entité. Il en vient même à considérer que les peuples capables de manipuler les éléments ne sont pas de la même espèce entre eux, et que les exempts ne sont "que des humains, méritant d'être traités comme une espèce d'insectes nuisibles et sans intérêts". Je vous laisse apprécier un instant le niveau de tolérance d'Orkem.


 

Orkem part du principe que tout élément peut avoir une maîtrise et prend très au sérieux la possible existence des maitres de l'élément Matière. Il songe d'ailleurs fortement à s'octroyer deux gardes du corps de cet acabit plutôt que les habituels lourdauds qu'on lui confie, quoi qu'il aie renforcé ses critères de sélection, en vue d'avoir une carte de plus dans sa manche. Si il ne croit certainement pas que la chose soit facilement possible, ni sur le moyen, ni sur le long terme (et sur le court, n'en parlons pas), il garde en tête le fait qu'absolument rien ne soit soumis à ce qui pourrait être appelé le "risque zéro", aussi garde-t-il son idée dans un coin de son cerveaux tortueux pour  la ressortir des que l'occasion s'en présentera. Une fois soumise à la pratique, la théorie a parfois tendance à s'effondrer, un militaire ne saurait l'ignorer, aussi n'envisage-t-il pas de conserver ce projet si celui-ci venait à être balayé une fois mis à l'épreuve. Cela ne reste qu'une vue de son esprit cependant, et n'ayant que des rumeurs d'existence des Matière, il poursuit sa lubie sans avoir la preuve que ces élémentaires existent, et il est fort possible que si les années à venir ne lui démontrent pas clairement leur existence, il en abandonne jusqu'à l'idée par manque de temps et de preuves de possibilités.


L'honneur est une valeur qu'Orkem défend de toutes ses forces. A l'inverse de beaucoup, il ne considère pas l'homosexualité comme dégradante, les sentiments ne sont pas maîtrisables, par conséquent, comment blamer un homme qui en aime un autre? Les émotions, en revanchent, sont maitrisables avec de la rigueur et de la discipline. Il ne supporte pas les faibles d'esprit, les pleurnicheurs, les peureux et a beaucoup de mal a tolérer l'empathie, qu'il considère comme une véritable faiblesse. Cela dit, ce n'est pas ce qui le travaille le plus. Si il devait lutter contre quelque chose en particulier, Orkem serait contre le populisme, porte ouverte à tous les déboires. Pour lui comme pour beaucoup de membres de la nation du Feu, l'ordre, la hiérarchie et l'obéissance sont les bases d'une société saine et efficace. Petit fait amusant, il voue une véritable passion aux fourmis, abeilles et termites, qui sont selon lui les exemples de société parfaites.

Une fois dans sa vie d'enfant, une seule, l'année de ses treize ans Orkem a désobéi à ses parents. Suite à une violente altercation, comme toujours pour des broutilles, avec son autorité paternelle, Orkem a fugué, ne supportant plus l'autorité violente de son père et les brimades de ses frères, et n'est revenu que deux mois après à son domicile, de lui-même. Inutile de préciser qu'il a pris ce jour là la raclée de sa vie, mais il s'y attendait, s'y était préparé, et avait, durant cette escapade, éveillé deux choses qu'il ne pensait pas avoir en lui: l'ambition et la rigueur.

Il avait parcouru quelques kilomètres dans le désert, ne se souciant guère du danger permanent que représentait cette zone, même s'il la connaissait particulièrement bien, et finit par atterrir cahin-caha dans une grotte ou il s'abrita pour passer la nuit. Alors qu'à l'aide d'un briquet a silex chapardé à ses parents et de quelques plantes sèches qu'il avait passé la journée à accumuler, il alluma un feu pour compenser la froideur des nuits du désert. Il n'avait pas vraiment prévu qu'un simple, un tout petit fennec viendrait se réchauffer à ses côtés.

Non pas qu'il se lia avec l'animal, il passa tout simplement la nuit à le regarder, et tous les soirs, il accomplissait le même rituel, se nourrissant d'insectes et de petits animaux...mais il ne pouvait se résoudre, alors qu'il ne s'agissait là que d'une simple proie facile, à abattre ce petit animal qui lui faisait confiance au point de venir s'asseoir à quelques centimètres de lui pour profiter du feu. Un marché silencieux s'était passé entre eux : le fennec ramenait chaque soir un peu de nourriture, qu'il chassait dans la journée, et Orkem faisait du feu pour les réchauffer tous les deux. jamais ils n'eurent de contact physique direct, le jeune homme n'essaya même pas de le caresser durant les semaines passant, mais leur accord tacite était là : chacun aidait simplement l'autre à survivre. La nature humaine ne permettait pas ce genre de relations, pas réellement, ni durablement. Ce fut la seule période de sa vie où Orkem se sentit bien tout en étant sur un pied d'égalité avec un autre humain. Mais un soir, le fennec ne revint plus.

Il avait du tomber sur une proie un peu trop forte, un animal un peu trop gros. Et ce soir là, l'estomac d'Orkem lui fit mal comme jamais. Il avait faim, une faim terrible, tenace, qui lui tiraillait l'estomac à l'en faire se tordre de douleur, comme un insidieux serpent de douleur sinuant dans son système digestif. Après deux jours, trois, quatre, le fennec ne revenait plus, et Orkem ne mangeait absolument plus suffisamment pour pouvoir subvenir à ses besoins corporels, et ce fut à grand peine qu'il rentra chez lui, prêt à accepter la réprimande violente qu'allait lui infliger son père. Il s'y était préparé, et la leçon était retenue : l'utopie d'une vie égalitaire n'avait jamais été qu'une utopie. Et si parfois le plus grand et dangereux des deux parties d'une relation a besoin du petit pour survivre et réciproquement, si l'un des deux décède, l'autre doit pouvoir survivre tout seul. Or la mort peut survenir à n'importe quel moment, où et quand que ce soit, sans que personne n'y puisse rien. A partir de là, la seule solution pour survivre et se hisser au sommet lui paraissait donc simple : endurer, s'endurcir, grandir et s'élever jusqu'au sommet, vivre pour soi et pour soi seul.



Orkem travaille énormément, se détend peu, et est en permanente ébullition intellectuelle. Son manque de sommeil, son acharnement jusqu'à l'épuisement et es responsabilités l'épuisent psychologiquement, quoi qu'il aie une excellente condition physique, aussi s'adonne-t-il à des actes qui sont théoriquement sévèrement punis dans la nation du Feu: la consommation de drogues diverses et variées. Il trouve dans les hallucinations quelque chose de reposant, et depuis ses seize ans, début de cette habitude, il s'en est accommodé au point qu'à moins d'un sévère surdosage (chose grandement improbable quand on connait la méticulosité d'Orkem), l'expérience négative n'est pas une option. Ses deux "friandises" préférées sont les opiacés, occasionnellement, souvent plus pour soulager la douleur physique qu'autre chose, et les scorpions venimeux. Certaines espèces de ces scorpions, dont la piqure est théoriquement mortelle (sachant qu'à l'exception de certaines familles peu nombreuses dans la classification de ces animaux qui ont en guise de salive des acides ou des anesthésiants, la grande majorité n'est venimeuse que de leur dard), produisent en brûlant des substances différentes de celles du poison d'origine, dégagent des fumées altératrices de sens extrêmement puissantes. Il ne s'adonne pas à ces plaisirs interdits en public. Sven est au courant de ses agissements, de mêmes que Meh'Lir, mais le dictateur tolère cet écart tant qu'il ne nuit pas à l'accomplissement du devoir d'Orkem, et Meh'lir n'a pas vraiment son mot à dire la dessus. Cependant, dans la mesure où il reste à l'écart des regards pendant ses sessions de consommation et ce jusqu'à ce qu'il revienne à son état normal, et au vu de la charge de travail qu'il abat quotidiennement, il jouit de quelques passe-droits auprès des autorités...mais gare au trafiquant qui voudrait tricher sur la marchandise...