+ Quelle est ta région d'origine ? Y es-tu encore ?
Gorka, ma belle Gorka. Autrefois, c’était la plus belle région à mes yeux, surtout avec cette belle forêt fluorescente où j’aimais me promener des heures et des heures en compagnie de mes bêtes. Aujourd’hui, elle a tantôt des zones d’ombre, tantôt des zones lumineuses, elle est imprégnée tantôt de doux souvenirs, tantôt de vieux démons. Je ne pourrais vraiment pas vous dire si j’aime ou non ma région – surtout en n’ayant pas un réel comparatif pour me décider sur un tel sujet - alors je me contente de vous dire que « oui, je suis née à Gorka, et j’y vis encore ». Par contre, contrairement à mes confrères et consœurs, je ne vis dans une petite maisonnette avec un champ. Je vis à l’écart de tous, changeant d’emplacement tous les jours au gré de mes humeurs ou du temps. A l’image de notre grande Déesse, je me contente d’être spectatrice du monde des vivants, me cachant parmi les bêtes. Ou devrais-je dire, je suis spectatrice d’un monde de bêtes, en compagnie de mes doux et fidèles compagnons.
+ Parle-moi de ta famille, et de ton lien avec elle.
Je viens de la famille « Hussard», une famille qui autrefois détenait de grande terre et une auberge populaire. Grâce à cette richesse, mon père a pu se remarier à trois reprises, en choisissant les épouses qu’il désirait. Ma tendre mère était cette pauvre troisième épouse, jeune et jolie, condamnée à vivre avec un vieillard lubrique. Dès son plus jeune âge, elle avait à s’occuper des nombreux enfants de son époux et des défuntes épouses et la vie n’était guère simple. Elle était si épuisée entre les champs et la maison qu’elle donna sa vie … en me donnant la vie, quelle ironie du sort ! La suite, elle restait classique : dernière de la famille, on ne s’intéressait à moi que quand il était question d’aller travailler (pour engraisser leur poche). Autrement, à la mort du patriarche, la fratrie préférait se faire la guerre pour chaque lopin de terre. Personnellement, ma vie simple où il fallait traire, tondre ou encore retourner …
Une vie « trop » simple, que quelqu’un avait décidé d’y mettre fin. Je ne me rendais pas compte qu’au fil des années, l’arrivée massive des épouses et époux de mes frères et sœurs, et l’apparition de mes rondeurs attiraient des regards, voire éveillée de violents désirs dans certains cœurs – ou membres, devrions-nous dire. Je ne l’ai découvert que trop tardivement, à mes dix-sept ans, dans une grange quand un époux d’une de mes trop nombreuses sœurs a voulu montrer et me faire subir sa virilité. Depuis ce jour, je me considère comme orpheline. Alors, j’ai opté pour « Tryss », le nom de jeune fille de ma mère, un nom commun qui n’éveille rien dans les esprits. Ai-je de la famille maternelle ? Je m’en fiche. Je ne désire pas le savoir. A mes yeux, la famille n’a guère de la valeur.
+ Si tu pouvais aller dans une autre région d'Oranda, où irais-tu et pourquoi ?
Vanui. J’ai entendu dire qu’il y avait de grandes cascades et une belle forêt. Je pourrais aisément m’isoler, et me contenter de la pêche jusqu’au restant de mes jours. Peut-être même pourrais-je me lier avec quelques bêtes nordiques. En somme, Vanui est la région qui pourrait se rapprocher davantage de mon existence isolée et ermite au sein de Gorka. Dahud est une ville qui m’effraie en raison de sa trop grande population et de la diversité de ses énergumènes. Sezni est une région aride et sèche où je ne pourrais définitivement pas me contenter d’une existence recluse. Enfin, Sterenn, seconde région qui pourrait m’attirer pour leur sens de l’équilibre des choses et d’une vision particulière de l’existence.
+ Quel est l'élément que tu haïs au plus haut point ? Pourquoi ?
Croyez-le, ou non, je hais l’élément Terre. Je hais en raison de ce qui est possible de faire avec, je hais en raison de toutes ces mauvaises personnes qui ont droit à de tels dons, je hais en raison de cette maudite journée où j’ai perdu toute innocence entravée par cette maudite Terre que je chérissais tant. Car oui, pour me faire taire, pour me tenir, pour m’empêcher de fuir, ce maudit beau-frère a entravé tous mes mouvements avec son don qu’il maîtrisait bien mieux que moi, un don que je ne maîtrisais qu’avec grande peine, ne m’étant jamais penché sérieusement. Alors, oui, je ne garde qu’un mauvais souvenir de chaque étape qui fera de moi une maîtresse de la Terre. Et chaque fois que je vois les rainures de mon tatouage s’étendre, je retiens un sanglot de rage car chaque rainure me rapproche des mêmes rainures que celui qui m’a détruit, qui a été le point de départ de mes multiples malheurs. Pourtant, ce don de la Terre est une partie de moi, une partie que je ne peux pas éradiquer ou ignorer. Mon don se manifeste au fil de mon âge, au fur et à mesure de mon exil où j’enchaîne encore et toujours mes chasses, mes pérégrinations de chasseresse … Alors, en conclusion, je dois dire que je hais une partie de moi.
+ As-tu un secret ? Un secret dont personne ne devrait en entendre parler ?
Je chasse. Cela peut sembler bien ridicule pour toutes personnes issues d’une autre région, et portant la marque d’un autre élément, mais ce n’est nullement le cas à Gorka, auprès de ces maîtres de la Terre qui aime, chérit et prie même ces animaux. Mais je chasse car je suis dans l’obligation de chasser. Je ne peux pas – et je ne veux pas – retourner auprès de ma famille paternelle autrefois prospère qui était brisé en multiple morceau de lopin de terres. Je ne peux pas – et je ne veux pas – non plus avoir à vivre une vie sédentaire et être « encore » sujet à de potentielles attaques d’hommes. Je ne peux plus, et je ne veux plus, être la cible des médisances gratuites de ces bonnes femmes qui m’ont accusé coupable avant de l’être. Car oui, j’ai été la victime de mon beau-frère mais tout le monde m’a mis dans le rôle de la coupable, cette démone qui séduit le mari de sa sœur, et tout le monde m’a traité de tous les noms possibles et imaginables. Alors oui, en théorie, je devrais devenir une fille de joie – sans le sou, sans famille, médit par toute sa communauté – mais je me refusais et j’ai reçu le soutien d’un étranger, qui m’a dit de me battre plutôt que de me soumettre. Alors, je me bats. Pour ma survie. Pour ma liberté. Pour mon indépendance. Et malheureusement, la plus grande force de cette région est sa faune, flore et ses animaux.
J’avais donc trois choix : devenir une putain, devenir une autre bonne femme au service de mauvaises personnes comme ma mère – ou moi-même à dix-sept ans –, ou tout simplement devenir une chasseresse. Alors je chasse pour la fourrure ou la peau que je tanne, puis je revends tout simplement tout cela à des marchés au Dahud. Quelques fois, je donne de la viande fumée des plus délicieuses, voire de plus en plus prisées en raison des mélanges d’épices ou de ma façon de faire.
+ Quel est ton rôle au sein de ta région ?
Je n’ai aucun rôle. Je suis l’ermite qui vit isolée de tous. Je suis cette chasseresse qui prend de grands risques pour quelques poignées de sous – ou pour tout autre don avec la troque -. Je suis cette jeune fille dont tout l’honneur et la réputation a été souillée impunément par tous, et toutes. Je suis tout simplement une simple ombre.
+ Si tu devais assister à une mise à mort injuste qui mettrait en danger un innocent, que ferais-tu ?
J’aime dire que je suis spectatrice de ce monde mais je me refuse d’être totalement passive. J’ai été victime à mon tour mais considérée comme une coupable, je sais le désarroi que l’on peut ressentir. Et je sais la joie que retire le véritable coupable. Alors, je ferais tout pour empêcher cette mort injuste, en pointant mon arc sur le bourreau au besoin.
+ Que penses-tu de la séparation entre les éléments ? Crois-tu que cela est normal, ou contre-nature ?
Je ne désire qu’une vie simple et cette question dépasse les frontières de ce monde simple que je tente de construire, et de maintenir. A mes yeux, tout élément est mauvais car de mauvaises personnes peuvent l’utiliser contre de faibles personnes. Je pense que nous devrions ne pas en avoir, tout simplement, et vivre en nous appuyant uniquement sur nos cinq sens, ces cinq sens que je chéris tant… Du moins, quatre sens pour moi. Je n’arrive plus à déguster un plat pleinement, ayant perdu toute capacité à ressentir un goût. Quoique, ma blessure se cicatrice, et je commence à « goûter » au plus forts mets. J’ai espoir de pouvoir ressentir chaque nuance de toutes ces baies ou mets que je me prépare (car même si je chasse, je me refuse de manger de la viande . Ca serait le comble de l'impiété. Je me contente de fumer pour m'assurer une condition financière ou nourrir mes bêtes) ou les rares voyageurs qui partagent mon feu.
+ Crois-tu en l'existence de l'élément Matière ?
A l’image des éléments, je me fiche de « qui » a « quoi ». Rien de tout cela ne devrait exister, tout simplement. Mais si vous insistez, non, je ne comprends pas de quoi vous parler.
+ Si tu devais défendre quelque chose, une idée, un concept, une valeur ? Et si tu devais t'opposer à quelque chose ?
La Justice, la véritable Justice. J’aime imaginer un monde juste où les tribunaux sauront mettre les vrais coupables au pilori ou dans les cachots et que les innocents pourront devenir paisiblement. J’aime imaginer un monde où il n’y aurait pas de distinction entre les hommes et les femmes pour ces éléments, mais pour leur capacité et leur force. Un monde où les pauvres innocents qui ne choisissent pas leur condition – comme les exempts – puissent décider de leur propre avenir, voire d’avoir une place à la lumière. Oui, je prêche un monde où les hommes naissent libres, et égaux. Malheureusement, pour de multiples raisons, ma voix ne sera pas entendue. Littéralement. Pour certaines raisons, une grande partie de mes cordes vocales, de ma langue voire même de mes « poumons » ont été « brûlé » par quelque chose qui n’aurait pas dû être bu. Depuis, mes papilles sont insensibles, ma respiration sifflante quand je fais trop d’efforts et ma voix au mieux un murmure – le murmure étant un signe de cri pour ma part. Par analogie, je m’oppose à l’injustice et à la condition des exempts.
+ Si tu devais me raconter un événement du passé...
Imaginez une grange et une jeune brunette qui recherche un objet perdu de son beau-frère dans une botte de foin. La pauvre idiote cherche encore et encore, mais elle ne trouve rien et elle ne trouvera rien car il n’y a tout bonnement rien. Pendant cette recherche, son beau-frère en profite pour fermer les lourdes portes de la grange et les barricader puis pour se glisser non loin de cette jeune et jolie belle-sœur, pour l’empoigner à sa taille, pour la jeter contre ces bottes de foin qu’elle avait retourné encore et encore, pour dévoiler cette poitrine plantureuse d’une main et de mettre une autre main sur cette bouche qui voulait hurler. Sauf qu’il n’avait que deux mains, et trois tâches : la faire taire, diriger sa virilité et saisir cette poitrine qui le faisait baver. Alors, du haut de sa quarantaine, il entrave une partie des jambes et bras de la brunette avec des sables mouvants et l’a fait taire avec le foin même. Alors, comme une poupée, il joue. Ni les larmes, ni les muscles crispés, ni le regard implorant, ni le sang n’arrêtait ce qui avait laissé place à une bête. Ce jour-là, la demoiselle avait appris une chose : la bête n’était pas un animal à quatre pattes avec une fourrure et des canines, mais des hommes avec des jambes et des bras et un regard malsain. Si l’histoire s’était arrêtée là …
La belle-sœur surprend son époux sortir en sueur de la grange, elle entre dans la dite grange et voit l’état de sa sœur. Au lieu de l’aider, au lieu de la réconforter, elle ne lance qu’un regard noir et l’insulte. En parallèle, elle l’aide à se relever et à remettre de l’ordre dans sa tenue pour qu’elle ne paraisse pas trop chambouler. ET elle répète, encore et encore, « tu dois voir une guérisseuse au plus vite, car porter l’enfant de ton beau-frère, de MON époux, ça serait le comble » (mais en des termes moins courtois). La guérisseuse en question était davantage une sorcière. La sœur voulait la mort de la petite sœur – car ce couple était en pleine acquisition des affaires des Hussard et qu’il n’était pas question qu’une telle affaire entache une prospérité si imminente et si grande, et parce que cette sœur avait toujours jalousé cette petite sœur si belle et désirable pour bien des hommes -. La sorcière disait ne pas faire commerce de la mort, mais elle pouvait promettre le « silence ». Une potion qu’on lui fit boire à cette pauvre idiote qui avait encore la stupidité de croire en sa famille, et dont les cordes vocales, la langue et une partie de ses poumons furent des plus brûlés. Pendant un an, ce n’était que douleur quotidienne … Jusqu’à ce qu’un rare voyageur de Vanui – un guérisseur venu récupéré des plantes – la découvre, et ait pitié d’elle. Il proposa bien vite bien des produits pour accélérer cette guérison.
Ça c'est mon histoire.
Voilà cinq ans que je suis à la lettre chaque recommandation de ce voyageur de passage qui m’avait accompagné, qui m’avait soigné, qui m’avait arraché de la mauvaise influence de ma famille, ou encore des médisances de ma communauté. Il m’a montré comment chasser, comme tanner une peau, comment saler du poisson … La première fois que j'ai eu à tuer une bête, j'ai pleuré des semaines entières. Je ne voulais pas recommencer mais il m'a indiqué mes choix, et mes possibilités ... Il m'a dit que je n'avais pas le choix. Que ce mal était nécessaire pour un bien : ma propre survie. Dès lors, pour apaiser un peu cet âme au début, je faisais des prières et remerciement avant et après la chasse. Mais au fil des années, je suis devenue plus insensible et plus une femme "pratique". C'était moi, ou eux. C'était moi, ou les bêtes humaines.
Puis il est parti, après m’avoir proposé de le suivre. J’ai refusé. Gorka, et ses bêtes – humaines comme animales -, je connaissais. Et je ne connaissais nullement les autres régions. Ajoutons à cela que malgré qu’il m’ait aidé, il n’en restait pas moins un homme que je fuyais. Pas lui spécifiquement, mais je fuyais chaque homme par instinct depuis ce maudit jour.
+ Une dernière chose...
Non, merci.
+ Et enfin, pour ce qui est du niveau de ton personnage :
Je souhaite avoir le niveau
au choix du staff car il est cohérent avec mon âge qui est de
23 ans ans et parce que
J’aime les surprises .